Lueur d’espoir au Pré Tunney
En flânant aux abords du Pré Tunney, à Ottawa, je suis tombée sur cette vieille bicoque abandonnée, flaguée à démolir, projet de condos oblige!
Tandis que je m’en approche, comme attirée par la lumière jaune et aguichante des restes de son ancienne affiche commerciale, j’aperçois l’évocation d’un crépuscule. Mais, c’est seulement lorsque j’arrive tout près qu’apparait plus précisément l’image bucolique d’un homme, un simple contemplateur, les fesses calées devant un lac qui reflète les diaprures jaunes et dorées d’un ciel entre chien et loup.
— Oh! Fis-je.
Une belle image fige, surprend.
Une belle image réveille, tire du néant.
Et nous replonge…
Tout de suite, comme par réflexe, je me mets à naviguer dans ce paysage par les yeux de cet homme – c’t’e chanceux – dont le dos courbé et relaxé traduit un certain relâchement des muscles et des nerfs: un bien-être.
— Ah! J’aimerais bien être là!
À mon tour, par mimétisme, j’essaye de me détendre, de prendre une bolée d’air.
J’inspire profondément, emplis mes poumons, puis expire tranquillement.
Mes joues picotent un instant.
— Wow!
Si seulement on pouvait rester dans un souffle et habiter sa félicité.
Cependant, je ne suis pas cet homme et mon lac n’est pas calme qui est plutôt cette rue poussiéreuse d’un Ottawa caniculaire.
Y fa chaud et mon break finit dans 5 minutes.
Je me sens tout d’un coup tiraillée par cette envie irrépressible de la baignade estivale:
Comme je plongerais, nagerais jusqu’à l’île, et reviendrais!
Comme je barboterais, avalerais de l’eau, et la recracherais dans l’eau!
Vallées de crawl
Montagnes de crawl
Fleuve de crawl
Mer de crawl
Comme je laisserais libre cours à mon chacal d’eau!
Je m’appelle Laurence: mes amis m’appellent l’eau l’eau.
Ici, Pré Tunney, je suis si loin de chez moi.
***
Qu’un paysage crépusculaire émeuve est plutôt cliché, mais en cette journée de juin 2018, ça m’aura éjecté de la grisaille urbaine et ça m’aura précipité dans «l’ailleurs», dans l’espoir de l’eau: qui shui.
Un jour, dès que la cloche de mon école de langue aura fini de me sonner, viendront les vacances mouillées de larmes de joie, de lacs et de rivières que j’aurai méritées.
LSB, Gatineau et Ottawa, juin 2018